Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
J.-H. Rosny

J.-H. Rosny aîné "Lettres à Han Ryner" (1912-1930)

28 Janvier 2014, 14:56pm

Publié par Fabrice Mundzik

Merci à Clément Arnoult (voir le Blog dédié à Han Ryner) pour la transmission de ces documents et informations.

Plusieurs documents en lien avec J.-H. Rosny aîné se trouvent dans les Cahiers des Amis de Han Ryner, nouvelle série, n°90 (septembre 1968).

Tout d'abord, un "Hommage à Han Ryner", par J.-H. Rosny aîné, déjà publié sur ce Blog.

Ensuite, une série de "Lettres à Han Ryner (1912-1930)" de J.-H. Rosny aîné est aussi publiée dans ce numéro des Cahiers des Amis de Han Ryner : "nous avons décidé de publier ici l'ensemble de précieux documents que nous a confiés Robert Borel-Rosny. Et quelques autres, complémentaires, venant de nos archives, entre autres des lettres de Rosny à son ami."

Il convient de préciser que les Notes qui suivent les lettres sont aussi extraites du Cahiers des Amis de Han Ryner et ne sont pas des ajouts de ma part. Dont acte.

LETTRES A HAN RYNER

Paris, 5-6-12.

Cher ami,

Je voudrais pouvoir vous dire, avec quelle gratitude et avec quelle joie, j'ai lu et relu votre bel article sur la Mort de la Terre. Vous savez que vous êtes un des hommes dont l'estime littéraire m'est le plus précieuse et que je ne suis pas insensible : vous pouvez mieux vous figurer mon état d'esprit que je ne pourrais vous l'écrire !

Merci, mille et mille fois. Croyez à ma reconnaissance sincère et à ma croissante affection. Ma femme vous envoie ses meilleurs messages.

De tout cœur.

J.-H. Rosny aîné.

Timbré de la poste du 3-1-1914 adressée à Monsieur Han Ryner - Henri Ner 1, rue des Nonnains d'Hyères, Paris.

47, rue de Rennes (VIe)

Merci de grand cœur. Cher ami.

Moi aussi, je vous souhaite le grand succès que mérite votre beau et haut talent, et aussi l'humble contentement sans quoi tous les succès du monde ne sont que pourriture.

Croyez à mon sincère dévouement, qui est surtout un dévouement pour les heures d'attaque et à mon admirative affection...

J'ai oublié de vous écrire à propos d'une brochure où vous aviez jeté à pleine main votre sagesse et votre logique.

De tout cœur.

J.-H. Rosny aîné.

Timbré de la poste du 6 juin (?) 1914.

Quel livre merveilleux et séduisant vous m'avez envoyé, cher et admiré ami ! Vous y unissez tous vos dons d'intelligence, de style, d'humanité, à une fiction aussi captivante que le furent les Robinsons à nos âmes jeunes.

J'ai vécu avec ce livre de délicieux moments de rêve entrecoupés de méditation, et je vous admire plus encore que naguère !

De tout cœur.

J.-H. Rosny aîné.

P.S. — Et j'oubliais de vous dire que ma présence, sous forme de livre, chez les Atlantes m'avait fait plaisir.

Note : 11 s'agit, évidemment, des Pacifiques qui venaient de paraître.

Timbré du 25-11-1922 - Monsieur Han Ryner - 38, quai des Célestins, Paris.

Cher ami,

Comme il est sage ce livre... Comme on voudrait que les hommes crussent que c'est cela et qu'ils se missent en route vers cela. Avec vous la fable humaine est belle. Elle ne l'est guère avec l'immense majorité des êtres : la punition du grand cimetière terrestre est sur les âmes.

Mon admiration et mon amitié.

J.-H. Rosny aîné.

A propos, j'avais écrit personnellement n'aimant pas à être enlisté, pour votre prix Nobel. Puisse votre heure venir.

Note : de quel livre s'agit-il ? Rosny connaissait les deux livres réédités : Le cinquième Evangile, et les Paraboles Cyniques ?...

Daté poste du 6-12-1923.

Cher ami,

Quel superbe article... et si exquis pour votre vieil ami, qui a été, vous le savez bien, infiniment touché ! Ah ! si les zigues qui tiennent les grosses feuilles et revues parlaient ce langage-là... Mais ils ne le peuvent ni ne le veulent.

Mon affectueuse poignée de mains.

J.-H. Rosny aîné.

Note : Il s'agit de l'article : Le point de vue.

Date de la poste 22 février 1930.

Cher admiré ami,

On a rearrangé mon logis et les livres y forment un inextricable chaos ! Je désespère de retrouver Songes Perdus. Est-il possible de m'en faire tenir un deuxième exemplaire.

De tout cœur.

J.-H. Rosny aîné.

10-2-1930.

Cher et admiré ami,

Je vous demande grâce : je n'ai pas le temps de préparer une étude — je vous propose une allocution mais aussi élogieuse que vous pouvez le souhaiter. Un disciple ajoutera toute une étude et puis on lira des passages de vos livres...

Si vous avez quelques notes indiquant ce que vous aimeriez que je dise envoyez-les moi.

Je suis accablé de soins et de travaux... et chaque jour un tas de lettres me demandent des services futiles, que je ne peux refuser et qui me harassent.

De tout cœur.

J.-H. Rosny aîné.

Note : Il s'agit peut-être de la séance consacrée aux Songes Perdus qui fut donnée chez Aurel le 27 mars, avec Rosny aîné.

Paris, 10 avril 1930.

Cher ami, admiré,

Encore un livre où éclate votre talent, votre intelligence, votre grande richesse d'âme Prenez-moi tous.

A chaque page des révélations.

J'admire l'amour de Kersos pour Orphée — mais je ne le comprends pas par les nerfs.

Que livre magnifique : Crépuscules...

En hâte, cher ami — je suis encore plus accablé de travail que d'habitude.

De tout cœur,

J.-H. Rosny aîné.

LETTRES A J.-H. ROSNY AÎNÉ

Paris, 16 novembre 1910.

Monsieur,

Mon cher Poinsot m'écrit que vous voulez bien accepter la présidence du déjeuner dont quelques amis désirent honorer mon nouveau livre. Je vous prie de trouver ici, avec mes meilleurs sentiments, l'expression de la joie que vous m'apportez. Vous savez que, parmi les écrivains, vous êtes celui dont l'estime et la sympathie me sont plus particulièrement précieux. Poinsot n'est pas bien sûr d'avoir précisé avec vous le jour et l'heure de cette amicale manifestation. Dans sa pensée, elle doit avoir lieu le dimanche 4 décembre à midi. Si, pour une raison quelconque, une autre date vous convenait mieux, vous n'auriez, bien entendu, qu'à lui faire connaître votre désir.

Agréez, Monsieur, l'expression de ma reconnaissance et de ma fidèle admiration.

Han Ryner.

Note : Cette lettre se rapporte au « Banquet du Cinquième Evangile », qui eut lieu, en effet, le 4 décembre. Nous avons donné dans le n° 24 des « Cahiers des Amis de Han Ryner », le Discours de Rosny d'après les Loups, en rappelant que le Discours de Han Ryner se trouvait reproduit dans Face au Public.

Paris, 27 février 1922.

Maître aimé,

Merci pour votre bonne lettre et pour tout ce que vous avez fait et tenté pour moi.

Je ne verrai pas mon heure. Je suis un « homme posthume », comme dit Nietzsche. C'est compris et accepté. Accepté joyeusement : je vais pouvoir, en un retour de jeunesse que je sens monter, attaquer franchement à droite, à gauche, sans rien ménager, en homme qui n'a rien reçu et qui ne veut plus rien recevoir.

Heureusement, je n'ai rien reçu à l'heure où j'aurais eu la faiblesse d'accepter : je passerais mon temps à lire, à rêver, à métaphysiquer. Tandis que, libre enfin — à la retraite — et pauvre, plus que pauvre, mais m'en fichant, je vais vivre, c'est-à-dire combattre.

Et je n'épargnerai personne ; ceux que je n'aime, pas et que je n'estime pas, je leur dirai les raisons de mon mépris et comment ils transforment en moi l'amour en pitié.

Je n'en dirai que plus haut mes amitiés et mes admirations. Si vous pouvez me faire envoyer votre livre sur La Science et le Pluralisme, j'aurai plaisir à en parler ici ou là.

A vous de cœur et d'esprit.

Han Ryner.

Note : Han Ryner a pris sa retraite le 1er janvier 1922. Il va publier les Véritables entretiens de Socrate qui sortiront le 23 mars. Il a commencé sa collaboration au « Journal du Peuple », et, nous relevons, en janvier et février 10 sujets de conférences de lui.

Paris, 25 mars 1924.

Maître aimé,

Je sors de lire L'Amour d'abord. Clotilde, Claudie, Philippe sont d'une vérité passionnante. Et jamais vous n'avez écrit avec plus de perfection subtile. Si nos jeunes n'étaient en littérature aussi odieux que Philippe Varanges en amour, de quelles acclamations ils salueraient la beauté chaque jour plus ardente, plus sobre, plus poétique, plus pleine et contenue de votre style. Ils y consentiraient peut-être, si vous n'aviez qu'un ou deux beaux livres. Mais vous êtes encombrant avec vos quinze chefs-d'œuvre, si différents et si irremplaçables. Et vous les humiliez par la profondeur de la pensée, la pénétration de l'analyse, la puissance constructive.

Pour la joie des hommes futurs, le 21e siècle vous vengera. Il avouera ce que quelques-uns sentent et refusent de dire, que vous êtes le premier de nos écrivains.

A vous de cœur et d'esprit.

Han Ryner.

Paris, 13 mars 1926.

Maître aimé,

Le Cœur tendre et cruel : un admirable livre et qui pénètre bien profondément la période obscure et troublée de l'adolescence. J'aime l'aventure avec Rose ; et celle avec Stéphanie ; et la liaison avec Gabrielle est traitée supérieurement. J'ai pourtant une préférence pour l'humour de la première partie. Votre humour a une saveur toute particulière — une saveur de plénitude.

Vous allez recevoir mon nouveau livre, L'ingénieux hidalgo Miguel Cervantes. Si vous pouviez quelque part parler de cet homme si multiplement grand, et si malheureux, et si mal connu encore, et faire allusion à ma biographie romancée ; j'en serais bien fier et vous aideriez un livre où je crois avoir mis beaucoup de moi et qui cependant me paraît abordable à tous.

Croyez à toute mon affectueuse admiration.

Han Ryner.

Paris, 29 octobre 1926.

Maître aimé,

Quel tableau exact et vivant de la littérature actuelle que votre Jeune Fille à la Page ! Le fond est amer mais l'humour du style et la malice du dialogue sont souvent irrésistibles. Je n'ai pas toujours souri, j'ai ri quelquefois.

Les deux mentions de Han Ryner m'ont profondément touché et le pittoresque ramassé de sa « barbe en hache » m'a beaucoup amusé.

Gloire à J.-H. Rosny aîné !

A vous en fervente admiration et affection.

Han Ryner.

Paris, 28 février 1928.

Maître aimé,

Merci pour l'admirable livre. Si brillant de jeunesse et savamment nuancé. Sylvaine, Edith, Lilian, Armande, et jusqu'à Nancy, et jusqu'à Madame de Ramoyres, et jusqu'à cette Geneviève naïvement farouche et fière : quelles rencontres délicieuses. La fière obstinée et les fières capricieuses se dressent et vivent dans pourtant de la grâce. Mais le tour de force me paraît d'avoir réussi Armande.

A vous en toute admiration et en toute affection.

Han Ryner.

Paris, 1er janvier 1929.

Maître aimé,

Vers vous les premiers mots que j'écris cette année.

Quel magnifique livre que La Fille des Rocs ! Françoise et Godefroid achèvent 1928 dans une gloire.

Puisse 1929 descendre sur votre tête, sur votre génie, sur votre œuvre, comme une couronne.

Vous avez dû recevoir, il y a quelques mois. La Sagesse qui Rit où je me suis donné le plaisir (page 203) de citer La Guerre du Feu.

Bientôt, j'espère, vous recevrez mon « roman prophétique », Les Surhommes.

A vous en toute admiration, en toute affection.

Han Ryner.

A lire aussi :

DOSSIER : J.-H. Rosny et Han Ryner (Henri Ner)

Han Ryner "J.-H. Rosny" in Les Hommes du jour (1910)

Vidéo de Han Ryner (Henri Ner) et J.-H. Rosny aîné vers 1920

Allusions : Henri Guilac "Bonshommes de Lettres" (1924)

J.-H. Rosny aîné dans les Cahiers des Amis de Han Ryner, nouvelle série, n°11 (1948)

J.-H. Rosny aîné "Hommage à Han Ryner" (1920) in Cahiers des Amis de Han Ryner, nouvelle série, n°90 (1968)

et sur le Blog de l'Amicale Des Amateurs de Nids À Poussière :

Han Ryner - Parabole (1918)

J.-H. Rosny aîné "Lettres à Han Ryner" (1912-1930) in Cahiers des Amis de Han Ryner, nouvelle série, n°90 (1968)

J.-H. Rosny aîné "Lettres à Han Ryner" (1912-1930) in Cahiers des Amis de Han Ryner, nouvelle série, n°90 (1968)

Commenter cet article