J.-H. Rosny aîné "La Croix de Navarre" (Nouvelle Revue Critique - 1930)
"La Croix de Navarre" de J.-H. Rosny aîné fut publié par les éditions Nouvelle Revue Critique en juillet 1930. Ce texte porte le n°55 de la collection Les Maîtres du roman.
Ce roman peut être placé précisement dans la métachronologie rosnyienne (cas peu courant) : la deuxième partie de l'histoire commence le 5 juin 1930.
Plusieurs thèmes récurrents chez J.-H. Rosny aîné sont abordés dans ce roman :
La déchéance : "Le jardin était jeune et rassurant. Toute chose y commençait, la feuille, la corolle, l'insecte, — tout était frêle, tout était confus, imprécis, balbutiant. C'était la genèse, c'était la croissance, une jeunesse infinie, tandis que, plus tard, quand la ramure serait dense et la roseraie éblouissante, ce serait déjà l'arrêt, la tristesse de la pleine force qui ne peut plus que décliner".
Les origines : "Est-ce que vous ne croyez pas que les yeux sont l'effort de vie ?... Il me semble voir en eux la joie du monde... toutes les choses exquises y sont assemblées... Ce sont des eaux, des pierreries, de la lumière... du ciel aussi, des nuages, des aurores, des crépuscules... et qui rencontre un regard se sent pénétrer dans un univers, dans une créature frissonnante !"
Les instincts : "C'est affaire d'instincts. Es-tu sûre du tien ? n'as-tu pas trop de confiance naturelle ?..."
Les sens : "Voilà trente ans que j'essaye de considérer l'univers... Oui, depuis trente ans, je souffre de ne pouvoir rien saisir, ni par la rétine, ni par l'oreille, ni par aucun sens enfin. Et je perçois, pourtant, de-ci de-là, tout ce que la contemplation des choses a d'admirable et de voluptueux".
La fin du monde : "Il y avait sur lui quelque chose d'infiniment terrible, qui ne venait pas de ces gens, mais qui se faisait "par" eux, et dont il sentait la suffocation et la pesanteur. Une épouvantable impression de fin du monde s'empara de lui. Ce fut comme s'il n'avait plus de semblables, comme s'il était sur une planète où nul ne le connaissait et où tous voulaient son anéantissement".
Il est très souvent question de grottes ou de cavernes dans les récits de J.-H. Rosny aîné (quelque soit la période historique concernée) :
"Marc devint mortellement pâle. Il vit devant lui cette chose formidable, cette caverne de lions que devient souvent la justice pour l'homme accusé d'un crime".
Un des passages de ce roman fait quelque peu penser à un autre texte de J.-H. Rosny aîné, intitulé "Dans la forêt gauloise" : "La bergère avait un charme très délicat. C'était une petite gauloise argentée, faible et fragile, perdue au fond des bois".
Hasard ? Choix délibéré ? Une des héroïnes se nomme Fanchon, tout comme le personnage principal de la nouvelle "Fanchon-la-Belle" publiée 9 ans plus tôt par J.-H. Rosny Jeune.
Ce même J.-H. Rosny Jeune nous a habitué aux longues listes d'auteurs cités au fil de ses romans, c'est, cette fois, au tour de son frère aîné de glisser quelques allusions à des écrivains au coeur d'un de ses romans : Dante, Baudelaire et Jean-Jacques Rousseau.
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