Collectif "Ecritures franco-allemande de la Grande Guerre" (Artois Presses Université - 1996)
"Ecritures franco-allemande de la Grande Guerre" est une étude publiée chez Artois Presses Université en 1996.
Parue dans la collection Lettres et Civilisations étrangères, elle regroupe des textes réunis par Jean-Jacques Pollet et Anne-Marie Saint-Gille.
A la lecture de la quatrième de couverture, la question peut se poser sur la légitimité de la présentation de cet ouvrage sur un Blog consacré aux frères J.-H. Rosny :
Les aspects politiques, militaires, économiques et géographiques de la Première Guerre mondiale sont à présent bien connus ; mais la rupture qu'a signifiée le déclenchement des hostilités en 1914 atteint également les domaines de la pensée, de la littérature et de la conscience des peuples engagés dans le conflit. Dû à une douzaine de chercheurs, germanistes ou historiens, cet ouvrage est consacré aux composantes philosophiques de ce qu'on a appelé, non sans raison, la "guerre des esprits" et à la mise en forme littéraire des diverses images de la guerre.
Dans la première partie, six études novatrices, étayées par des documents inédits ou non encore étudiés, rendent compte de l'attitude des écrivains et des intellectuels allemands et français qu'elles replacent dans le contexte des grands débats idéologiques de l'époque.
Contraints d'intégrer le thème de la guerre dans leur œuvre, romanciers et poètes ont tenté d'opposer à l'horreur du champ de bataille un traitement esthétique de ce thème lorsqu'ils n'ont pas magnifié le combat. La seconde moitié de l'ouvrage montre, à partir d'analyses de textes fondamentaux, comment s'est opérée la rencontre entre l'histoire littéraire et l'actualité guerrière et apporte des réponses inédites à l'épineuse question de sa fécondité.
Et pourtant...! Mais commençons par détailler le sommaire :
Jean-Jacques Pollet et Anne-Marie Saint-Gille - Avant-Propos
Première partie : La guerre des esprits
Michel Grunewald - Les intellectuels allemands modérés face à la Grande Guerre : le cas de Die Neue Rundschau
Helga Abret - La revue politique et culturelle März pendant la Grande Guerre
Anne-Marie Saint-Gille - A la recherche de nouveaux paradigmes politico-religieux : Hermann Hesse, Annette Kolb et Romain Rolland face à la Grande Guerre
Alexandre Kostka - Sur deux fronts. Harry Kessler et la propagande culturelle allemande en Suisse
Jean-Claude Montant - La propagande française en Suisse
Aimée Bleikasten - Dada contre la guerre
Deuxième Partie : Approches esthétiques
Jean-Marie Valentin - L'utopie poétique de l'humanité réconciliée. Ivan Goll : Élégies Internationales et Requiem für die Gefallenen von Europa
Maurice Godé - Le cercle de la revue expressionniste Der Sturm et la Grande Guerre
Rémy Colombat - Fünf Gesänge ou les désarrois expressionnistes de Rilke
Gilbert Merlio - Ernst Jünger, écrivain de la Grande Guerre
Pierre Vaydat - Le roman de la Grande Guerre en France et en Allemagne : esquisse d'une approche comparative
Jean-Jacques Pollet - De J.-H. Rosny aîné à Alexander Lernet-Holenia : récits de guerre fantastique(s)
Index des noms propres
Il y a donc un article sur les "Récits de guerre fantastique(s)", par Jean-Jacques Pollet, qui parle de J.-H. Rosny aîné. En voici l'introduction :
Dans la première quinzaine de septembre 1914, vers le soir, quatre brancardiers traversaient la lande du Loup Rouge. Le crépuscule venait, formidable et terrifique. L'enfer était dans le ciel et sur la terre. Une fournaise de soufre et de sang s'ouvrait dans la nuée ; la foudre des hommes, grondant au-delà des collines, ébranlait les arbres dans leurs racines et les rocs dans leurs profondeurs...
Ces premières lignes du roman de J.-H. Rosny aîné, L'Enigme de Givreuse (1917), pour esquisser l'objet de la présente étude : nous voulons lire ici des récits de guerre sur la Grande Guerre, mais d'une facture particulière, que l'on dira sommairement "fantastique".
Entendons-nous sur les termes. La notion de récit de guerre ("Kriegsnovelle"/"Kriegsroman" en langue allemande) implique une double détermination. D'abord, évidemment, temporelle : il s'agit d'histoires fictives (nous soulignons) censées se dérouler pendant la guerre, donc, en l'occurrence, entre 1914 et 1918. À cela s'ajoute une détermination géographique, tout aussi importante : l'histoire est censée se dérouler au plus près de la "réalité" de la guerre, c'est-à-dire directement sur le front, au milieu ou à proximité du champ de bataille ; elle peut éventuellement, épisodiquement, se passer "à l'arrière", mais cet espace ne doit pas être un lieu idyllique, totalement étranger à la réalité de la guerre (ceci ouvre, évidemment, la possibilité de cas limites, où la dénomination de "récit de guerre" pourrait être discutée). Quant à la catégorie du fantastique, admettons, pour ne pas nous perdre ici dans une vaine querelle théorique, qu'elle recouvre ces récits "dont le propre, pour reprendre une heureuse formule de M. Milner, est de jouer sur les limites du vérifiable et de l'invérifiable, du possible et de l'impossible."
Herbert Eulenberg, Gustav Meyrink, Kurt Münzer, A.M. Frey, A.H. Schmitz, K.H. Strobl, etc... Il évoque aussi Jean Lorrain, Marcel Schwob, Lars Gustafssons, E.A. Poe, E.T.A. Hoffmann, etc...
Un dossier réellement intéressant pour son approche inhabituelle et les idées avancées.
Commenter cet article